Mémoires de l'ombre
"Mémoires de l'ombre" est le titre d'un recueil de poésie. "Regret des oiseaux" est un extrait de cet ouvrage, dont l'auteur est Marcel Béalu. Vous pouvez le lire ici.
Je ne sais pas si vous préférez la lecture de haut en bas...
Ou de bas en haut ?
Ou encore en noir et blanc et dans un autre cadrage ?
L'ensemble se trouve dans un parking à Villeurbanne. J'ai voulu me renseigner sur le créateur. Wikipédia me dit qu'il s'appelle Philippe Favier, qu'il est un "artiste peintre et graveur, spécialisé dans les miniatures et les petits formats en noir et blanc". Ca m'a fait sourire, je me suis dit que là il s'était rattrapé de ses miniatures, avec ce poème de 20 mètres de haut ! L'artiste est multiple et atypique.
Mais quel plaisir que de trouver de l'art et de la poésie par surprise quand on va se garer !
Clic pour lire le texte tel qu'il est présenté.
Mais je vous ai recopié le poème, je me suis dit qu'après tout ce boulot, ça valait bien la peine que je tape quelques lignes. C'est moins fatigant à lire. J'ai seulement rajouté quelques respirations. :)
"Ma tour était un phare englouti sous les eaux.
Devant ses feux éteints et ses miroirs brisés, inutile guetteur je pouvais voir parfois, traversant les profondeurs opaques pleuplées de lémures, un grand navire aux flancs troués se poser sur un lit de bulles roses.
Loin de la nuit, loin du jour, enfoncé dans le silence, à plus de mille pieds sous les tempêtes et les ressacs, je vivais là, au milieu des étincelantes ténèbres où nulle heure ne sonna jamais. Le coeur léger d'être sans souvenirs, il m'arrivait souvent d'abandonner à ses propres moyens d'existence mon insolite méditation.
A cheval sur la rampe de cuivre je descendais en vrille, dans l'étroit escalier, jusqu'aux demeures humides, tapissées de perles vivantes, où m'attendait ma pâle, ma douce jeune fille. Elle me disait : je t'aime, je t'aime... Et sa voix ressemblait aux fleurs qui poussent dans le sable. Puis, enlacés comme des amants de la terre, nous remontions sans bruit.
Mille poissons lumineux enfermaient notre amour dans le cercle magique d'une ronde d'étoiles. Certains venaient coller à la vitre une bouche à forme humaine ou des yeux ronds qui avaient le regard des bêtes mortes. Mais quand leurs nageoires effleuraient nos murs de verre, nous nous serrions un peu plus fort pour ne pas entendre s'élever en nous comme un lointain battement d'ailes. "
Extrait de "Mémoires de l'ombre", Marcel Béalu, 1947